Ma mappemonde parle en Braille. Mes doigts courent sur les sommets et tracent une carte du monde de la haute altitude. Commencent par l’arc himalayen, phénoménal, à l’échelle d’une terre. D’un continent. L’arc immense des plus hauts sommets.
Température au sommet de l’Everest -24°
Température ressentie au sommet de l’Everest -38°
On s’égare sur la longue dorsale iranienne. Les hauts plateaux éthiopiens. Mes doigts courent sur le globe en prémisses de voyage.
De l’autre côté, l’infatigable soulèvement des Amériques, les Rocheuses de l’Alaska jusqu’au Mexique, les Andes à la suite. Des dizaines de milliers de kilomètres épineux, soulevés de terre, qui dominent, qui déchirent.
Les montagnes séparent les terres et unissent les humains. Les montagnes déchirent le sol et réconcilient les esprits. Tous, nous les voulons. Se tenir au sommet. À pas de géants bondir, de pic en pic, d’arête en arête, sauter les failles et les brèches, effacer d’un coup de crampon les plateaux et les plaines pour se hisser là-haut. Tout là-haut. Tout au bout de mes dix doigts.
Mais revenons aux origines.
L’arc himalayen parti de l’est s’étale vers le nord, s’étire vers l’ouest puis rebique brusquement pour s’achever vers l’est, cachalot émergé qui donne un coup de queue à la terre pour calmer ses ardeurs, lui montrer son ampleur. La façonner à son image. La queue du cachalot s’achève aux monts célestes. Mes Tian Shan à venir. Mon Ciel Bleu, mon Bleu Céleste impatient de me voir – ou serait-ce le contraire ?
Température au sommet du Khan Tengri -35°
Température ressentie au sommet du Khan Tengri -59°
Ce froid, ce froid, ce froid qui ne finit pas…
