Les carnets du Khan – 10/02/2025

En deux siècles, en cinquante ans, en vingt ans la terre a rapetissé. Elle s’est transformée en une petite rotondité sans ambition, une petite unité de mesure loin de sa démesure d’antan. Le temps hellénique de l’Océan final est éteint. Le temps du précipice en bordure d’humanité a vécu. Le temps de l’infini terrestre est dépassé. Maintenant, on prend la direction qui nous convient, on prend le vol qui nous suffit, on s’imagine intersidéral, on se prend pour Captain America, on s’ElonMuskise à la surface du monde foulé aux pieds, écrasé de stature, dépassé par l’humain. Les continents se franchissent à l’envi, les océans se survolent à distance, l’atmosphère n’est plus une limite, les reliefs et les forêts, les déserts et les fleuves ne sont que des zones colorées sur une terre devenue jouet. La terre est devenue démesurément petite.

Et puis, vient la réalité. L’expé qui ne part pas. La distance qui se rétablit. L’éloignement, le sain éloignement, le seul qui compte, celui du temps qu’on met.

Mon Bleu Céleste vient de s’éloigner d’un an, la distance qui me sépare de lui redevenue gigantesque.

Toujours quelques milliers de petits kilomètres ridiculement couverts par le moindre moyen-courrier. À peine quelques sauts de puce géante me séparent des Tian Shan. Mais lui reste, de nouveau, inaccessible. Infiniment loin dans le temps.

En un an, tout peut arriver…

Température au sommet du Khan Tengri -40°

Température ressentie au sommet du Khan Tengri -67°

L’hallucinante vigueur du vent qui te troue le goretex, te défonce la polaire, t’explose le duvet est un simple chiffre de papier. On n’y croit pas. Pas encore. Trop loin, tout ça, trop loin dans le temps, à défaut de l’espace. Aujourd’hui, la Terre a retrouvé une taille inhumaine, une dimension gigantesque, c’est salutaire.

Température au sommet de la tour Eiffel 4°

Température ressentie au sommet de la tour Eiffel 1°

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